Il y a quelques jours, nous avons relayé plusieurs articles de presse qui rapportaient les dégâts causés par les sangliers aux cultures ou à d’autres biens privés ou publics.
Ces derniers mois, des syndicats agricoles ont voulu dénoncé une situation estimée insupportable en interpellant les élus locaux et en organisant des opérations de communication spectaculaires comme des dépôts d’animaux abattus devant les mairies !
Il nous a semblé intéressant de replacer les choses dans leur contexte pour mieux comprendre les raisons de cet emballement.
Dans les articles qui vont suivre, nous allons tenter de nous immerger dans le monde particulier de la chasse.
Nous le ferons sans aucun parti pris, juste en rapportant des faits, des textes ou des propos.
PETIT HISTORIQUE DE LA CHASSE ET DU DROIT DE CHASSE
La chasse est une pratique ancrée dans l’histoire humaine.
Au paléolithique (de -2,5 millions d’années à 12 000 ans avant JC) de nombreuses avancées technologiques sont apparues comme le javelot de bois, l’épieu en if ou encore le propulseur permettant de catapulter des sagaies avec plus de force.
Au mésolithique (-10 000 à -9 000 ans avant JC), de nouvelles méthodes de chasse font leur apparition comme la chasse et la pêche au filet. L’arc apparaît, vers – 60 000 ans.
Au cours du néolithique (-9 000 à -3 300), les populations se sédentarisent. L’élevage se développe. La chasse, en tant que moyen de subsistance, perd de son importance. De moyen de subsistance, elle devient de plus en plus une activité de « loisirs ».
Cette activité se dote de règles. La notion de « droit de chasse » apparaît pour la 1ère fois dans le recueil de coutumes des francs saliens (peuplades des bords de la rivière Yssel aux Pays Bas) écrit sous le règne de Clovis (6ème siècle après JC).
Au Moyen Âge et sous l’Ancien régime (avant 1789), chasser le grand gibier devient un privilège de classe, réservé à la noblesse, aux dignitaires de l’État et au clergé. Le petit gibier est abandonné aux roturiers, c’est à dire la plus grande partie de la population.
Ce privilège est instauré par une ordonnance royale de 1436. Ce texte va organiser le droit de chasse pendant 4 siècles jusqu’à la révolution de 1789.
Des espaces sont aménagés spécialement pour l’exercice de la chasse : les garennes par exemple sont des parcs fermés initialement dévolus à toutes sortes d’animaux avant que le terme désigne spécialement un espace réservé à l’élevage et à la chasse du lapin.
Les braconniers sont craints surtout à cause de l’éventualité du port d’armes ; Les contrevenants sont sévèrement punis (l’édit de 1601 prévoir le fouet à la première récidive, les galères et la confiscations des biens à la seconde, la mort à la 3ème).
Pour permettre l’existence du gibier, il est interdit de moissonner avant la Saint Jean, d’enlever les chardons, d’enclore de murs les terres. Il est interdit de tuer les lapins sauf sous la direction des agents des eaux et forêts (les capitaineries). Afin de protéger le travail des paysans et les récoltes, les chasseurs ne doivent pas passer dans les terres ensemencées. Les vignes sont interdites de chasse du 1er mai jusqu’au vendanges. Ces interdictions sont peu observées.
Le droit de chasse, privilège et activité de détente réservé à la classe dominante, est un des plus détesté par les paysans car ils voulaient se défendre contre les « animaux féroces » (ours, loups) et les »animaux nuisibles » (sangliers, oiseaux granivores s’en prenant à leurs récoltes) en chassant eux-mêmes, sachant qu’il y avait peu d’indemnités pour les dégâts agricoles.
Dans la nuit du 4 août 1789, les députés révolutionnaires, réunis en assemblée constituante, abolissent tous les privilèges féodaux, dont le droit de chasse particulier institué par l’Ancien Régime.
Dès lors, les paysans se mettent à chasser le gibier dans les réserves royales et tuer en masse les lapins des garennes qui font de gros dégâts à leurs potagers.
La réaction ne se fait pas attendre : dès 1790, une loi est rapidement mise en place pour limiter le droit de chasse aux propriétaires terriens, seuls capables, parce que solvables, de payer des amendes en cas de délit de chasse.
La Révolution de 1789 a donc simplement aboli le droit de chasse en tant que plaisir exclusif réservé à la classe dominante. Il y a substitué la liberté de chasser associé à la possession d’une propriété. Comme sous l’Ancien Régime, le droit de chasse continue donc à être un associé au droit de propriété. Peut chasser celui qui est propriétaire et uniquement sur le terrain qui lui appartient.
La démocratisation de la pratique de la chasse n’intervient finalement qu’en 1844 : le 2 mars le Parlement adopte un compromis en votant une loi qui permet à tous de chasser avec l’accord tacite (et non expresse) du propriétaire.
Cette loi formalise la différence entre le droit de chasse et le permis de chasser.
Le droit de chasse, c’est le droit accordé à une personne de gérer, mettre à louer, autoriser autrui ou au contraire interdire la chasse sur le terrain dont elle est propriétaire ou usufruitière.
Le permis de chasser est l’examen que passent les personnes voulant exercer la chasse sur le territoire français.
L’obligation de satisfaire à un examen préalable à la délivrance du permis de chasser intervient en 1975.
En 2010, est publié au JO un décret créant une contravention de cinquième classe pour obstruction à un acte de chasse, passible de 1500 euros d’amende (Gouvernement FILLON).
Ce n’est qu’au cours du XXème siècle que le gibier cessera d’être considéré comme un simple objet de cueillette. On parle alors de gestion des effectifs, de protection de leur environnement, on adopte des périodes légales de chasse, on institue un permis de chasser.
A venir
La fonction de la chasse, son organisation,l’impact sur l’environnement, les critiques des opposants…
RAD
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