Connaissez vous Marie Louise Giraud dont le nom est étroitement lié au Moulinage de la Neuve à Marcols les Eaux – (Lire ou relire l’article consacré au Moulinage)
Marie Louise Giraud
Première femme maire d’Ardèche est aussi une des premières de France
Marie-Louise-Nina Giraud nait le 24 janvier 1899, quartier « La Neuve », commune de Marcols-les-Eaux.
Elle obtient le brevet supérieur, équivalent du baccalauréat et apprend l’anglais à Grenoble.
Après le décès de sa mère, elle doit interrompre ses études pour s’occuper de son frère aîné Jean, lourdement handicapé, elle sera à ses côtés toute sa vie.
Elle renonce au mariage et restera célibataire.
À la mort de son père, elle devient chef de l’entreprise familiale de moulinage qui comporte une vingtaine d’employés.
Protestante, elle est animée de convictions traditionnelles fortes : rigueur et exigence morale, droiture et souci de son prochain.
Elle sera toujours présente auprès des plus pauvres sans distinction de religion. Elle aide les enfants et les adultes sous forme de soutien scolaire. Elle s’engage dans la Croix-Rouge locale.
On vient souvent voir la Demoiselle pour demander un conseil.
La Deuxième guerre mondiale
En 1940, elle ouvre ses portes à des réfugiés belges déplacés par la débâcle.
En 1943-1944 elle abrite chez elle discrètement deux tailleurs hollandais d’origine juive.
Dans la nuit du 3 au 4 novembre 1943, un bombardier “Halifax” de la Royal Air Force s’écrase à Marcols-les-Eaux contre le « Rocher de Bourboulas ». L’avion transportait des armes pour la résistance drômoise.
Six aviateurs sont tués sur le coup.
Le seul survivant, le sergent mitrailleur John Brough sera pris en charge par Marie et regagnera l’Angleterre grâce à la Résistance.
L’aventure du sergent John Brough va renforcer la notoriété de Marie Giraud auprès de ses concitoyens et la faire connaître des milieux résistants.
Au cours de l’été 1944, le maire de Marcols-les-Eaux est arrêté par des commandos de la résistance intérieure. On ne le reverra jamais vivant.
La commune est dès lors administrée par le premier adjoint. La préfecture désigne quatre membres pour renforcer l’équipe municipal.
Le droit de vote et l’éligibilité des femmes sont officialisés par l’ordonnance du Gouvernement provisoire de la République française, le 5 octobre 1944. Ils seront utilisés le 29 avril 1945 pour les élections municipales.
Marie Giraud maire de Marcols- les- Eaux
Des habitants vont solliciter Marie Giraud pour être candidate. Elle finira par accepter sans enthousiasme.
En ce début d’année 1945, beaucoup d’hommes sont absents. Certains sont prisonniers en Allemagne ou réquisitionnés pour le service du travail obligatoire (STO). D’autres sont engagés volontaires dans les forces françaises. Deux autres femmes sont candidates.
Le 29 avril 1945, au premier tour, elles sont élues toutes les trois avec neuf hommes.
Le 13 mai 1945, le conseil municipal élit Marie Giraud maire par 11 voix et une abstention.
Aux élections du 19 octobre 1947, Marie Giraud est réélue de justesse mais perd son siège de Maire.
En deux ans les choses ont changé. Les communes environnantes ironisent sur une commune qui s’est choisie une femme pour maire.
Les hommes sont de retour, une partie des catholiques n’accepte pas une femme maire, protestante de surcroît.
La société rurale traditionnelle impose sa loi : Marie Giraud manquerait d’autorité, les catholiques lui reprochent une certaine froideur à leur égard. Un vent de fronde s’est levé contre celle qu’on est allé chercher deux ans plus tôt, les alliés d’hier sont les adversaires d’aujourd’hui.
Marie Giraud est très affectée par ces résultats ; elle restera cependant conseillère municipale jusqu’en 1977.
En 1951, elle est décorée de la médaille de la reconnaissance française.
Le moulinage de la famille Giraud à la Neuve, est fermé en 1966. La famille refuse les primes gouvernementales et la destruction des installations. Il est reconverti en écomusée, labellisé « Patrimoine Ardéchois ».
Marie Giraud décède le 11 février 2000. Elle est enterrée dans le cimetière familial d’Albon.
Sur sa tombe on peut lire cet épitaphe : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie aux autres ».
Le 30 octobre 2010, hommage lui a été rendu: la place de Gerland, devant le Moulinage de la Neuve, a été rebaptisée Place Marie Giraud.
RAD
Et si à Lamastre on avait une femme maire en 2020 !!!