On peut lire sur le site de la mairie de Lamastre avec abondance de photos mettant en scène tantôt un ministre, tantôt nombre de conseillers régionaux toujours prêts à ce genre d’exercice:
« Participante au label Villes Internet depuis 2011, notre commune rurale est bel et bien connectée mais également fière d’afficher 5 arobases, une distinction synonyme d’une implication numérique réelle sur le territoire ! »
« Mardi 29 janvier 2019, une délégation de la mairie de Lamastre s’est rendue à la Grande Arche de La Défense à Paris pour recevoir ce prix, en présence de Julien Denormandie, Ministre auprès de la Ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, chargé de la Ville et du Logement ».
L’info a également été abondamment relayée dans la presse locale.
Mais c’est quoi une Ville internet ?
On sait par les panneaux d’affichage que Lamastre est jumelée avec Tazlau et puis on découvre par un autre biais qu’elle est Ville Internet.
Je n’ai pas compris ce que ça voulait dire et je ne suis pas seul…
Internet est gratuit partout à Lamastre ? C’est quoi le concept ? Genre la ville est Internet, Internet ? Il y a du wifi gratuit ? C’est une ville webcam ou quoi ? Surveillée ? »
Rien de tout ça.
Après recherches, une ville « internet », c’est comme une « ville fleurie », une ville labellisée et le « diplôme » avec des @@@@@, c’est parce que, à sa demande, sa « politique publique numérique locale » a été jugée pertinente par l’association Villes internet qui gère le label.
Villes Internet est un pseudo-label, car non gouvernemental, comme il en existe tant en France (définition wikipedia), décerné chaque année depuis 1999 par une association d’élus et d’acteurs locaux aux villages, villes et intercommunalités qui en font la demande et qui ont inscrit une politique internet et numérique dans leur mission de service publique.
Le but de l’Association Villes Internet est le « développement de l’internet citoyen et du numérique urbain ».
La fondatrice du concept, Florence Durand-Tornare, indiquait en 2015 :
- Les règles du label sont simples
« L’idée, c’est que le citoyen puisse plus facilement avoir accès à ses droits et aux démarches. On n’est pas citoyen si on n’a pas accès à ses droits ! »
- les villes récoltent chaque année entre un et cinq arobases. mais personne ne repart sans rien :
« Toutes les villes qui se présentent ont au moins un arobase, ça montre qu’elles veulent faire quelque chose sur le numérique, se mettre dans un réseau sur ces questions. C’est au moins deux jours de boulot, il a une auto-évaluation à faire. »
- Chaque ville qui se présente adhère à l’association. La cotisation coûte cinq centimes par habitant et elle est plafonnée (50 euros minimum, 5 000 euros maximum)
« Ville internet »: est-ce à dire que Lamastre est ultra-performante sur les questions du numérique ?
A chacun d’en juger !
En plus de cumuler les fleurs, maintenant on cultive les arobases @@@@@
Avec “Ville fleurie”, on se réunit, c’est festif et puis on parle des fleurs, mais aller questionner ses concitoyens pour leur demander comment ils connaissent et utilisent les outils numériques de leur ville: c’est une autre paire de manches – ça ne se fait pas …
Il n’empêche qu’un panneau qui dirait que la ville est une ville internet, alors là, ça en jetterait presque autant qu’une photo avec un ministre !!!
RAD
Je ne suis pas tout à fait d’accord avec cet avis: « aller questionner ses concitoyens pour leur demander comment ils connaissent et utilisent les outils numériques de leur ville: c’est une autre paire de manches – ça ne se fait pas … »
Je trouve justement que les outils numériques peuvent être un outil démocratique en vue des besoins pour la transition écologique et pour développer l’intelligence collective. Mais cela demande un vrai accompagnement et des formations auprès des citoyens.
La révolution numérique est comparable avec celle de l’imprimerie, elle bouscule l’humanité et ses comportements en profondeur. Je trouve justement regrettable qu’il n’y ai pas plus d’accompagnement citoyen et de réflexion sur les outils numériques.
Personnellement, Je suis impliqué dans diverses communautés autour du logiciel libre, je trouve souvent regrettable le manque d’information sur les enjeux sociétaux qui découlent de nos choix numériques. L’Union Européenne et d’autres institutions d’état semble en comprendre les enjeux, même si les lobbies du GAFAM (google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) impose encore leurs choix, la nécessité de se détacher de leur emprise est évidente (voir à ce sujet: « Les logiciels libres, un instrument pour restaurer une souveraineté numérique de l’Europe »).
Cette histoire de label n’a en effet n’a pas beaucoup de sens à mes yeux. La commune de Lamastre ne semble pas particulièrement créer des événements pour sensibiliser la population à une éducation autour du numérique. Pourtant, il pourrait y avoir plusieurs idées novatrices, ludiques et créatives autour de ce thème. Comme exemple, en ce moment vient de se fêter Libre en fête dans plusieurs communes en France, voici un lien vers une carte des événements: Carte Libre en fête – 2019.
Au lieu de polémiquer sur un site non officiel, une « ville internet » n’aurait-elle pas dû avec ses moyens numériques mettre en place un outil pour inciter les lamastrois à voter pour le « plus beau marché d’Ardèche » ???